Les ateliers "Littérature et Totalitarisme" sont l'occasion d'étudier des œuvres en rapport avec le phénomène totalitaire, mais aussi de faire preuve de créativité littéraire pour ceux qui le souhaitent. Tout le monde peut devenir auteur, il n'est pas nécessaire d'avoir fait des études de littérature, ou d'avoir déjà produit un texte littéraire. Certains participent sans nécessairement créer, la liberté est laissée à chacun de faire selon sa sensibilité et son ressenti.
Pour vous inscrire aux prochains ateliers :
Vous trouverez ici quelques créations des ateliers, publiées avec l'autorisation de leurs auteurs, voici la section poésies et proses poétiques.
Poésies et proses poétiques
La bonne santé
L’hérésie avait des racines
Ulysse le savait bien.
Lui qui avec courage,
Et rusée résistance,
Au carrefour de sa vie,
Avait traversé
L’océan de l’éprouvante initiation qui,
De rive en rive,
Tel un funambule,
Tissait un fil rouge sur lequel
Ses pieds tentaient de trouver un sol.
Au gré des sacrifices,
Des obstacles rencontrés,
Peu à peu, s’érigeait l’autorité d'un homme,
Dont la tunique n’était pas faite de brandebourgs et d’épaulettes,
Mais du devoir de générosité et d’amour,
Du devoir sans illusions rêvées.
Avec lui, possiblement, s’ouvrait une ère nouvelle.
Celle des hommes loyaux et fiers,
Acceptés et reconnus,
Pour qu’ils deviennent efficaces.
Catherine
Une grande personne
Un petit bonhomme à la vie tranquille,
Ni bon ni mauvais, plein d’humilité... Il suit le fil
Quand tout à coup, on lui interdit
De se vêtir, vivre, se divertir... Quelle vie !
L’heure est au choix, pourra-t-il se taire ?
Saisir les armes et la bannière ?
On ne le lui a jamais appris.
Perte de confiance, il manque de défaillir…
Puis le courage revient car l’étoile sommeille en lui.
Sa lumière le guide à chaque pas
De cette longue marche qui dessinera
La légende personnelle de ce p’tit gars
Dont la fidélité à son âme n’est sans pareille ici-bas.
Ad’ailes
Passeport
Devant ce mur devenu sectaire,
Voici la condition d’un passeport sanitaire.
Nous sommes tous coupables, face aux esprits malléables.
La passivité est douloureuse, la désobéissance civile est bienheureuse.
J’entends l’approche au loin de la Terreur,
Cette liberté tant promise est pour notre malheur.
La Perversité joue comme une belle balade,
C’est le jeu de cartes, tous malades.
L’Innocence de nos enfants est sacrée,
Soyons le réceptacle pour la consacrer.
La contagion de l’Amour est recevable,
Dans l’écrin de notre cœur palpable.
L’obscurantisme avance à découvert mais,
La Lumière vaincra toujours et à jamais.
Véronique
Année noire
Dans cette année noire,
Nous disons adieu au contradictoire
La globalisation de la peur
Évince de nos cœurs toute chaleur
Nos corps confisqués
Ne sont plus libres de circuler
Quand le pouvoir sépare
La créativité se fait rare
C’est le temps de la confusion
Je l’appellerai discrimination
Nous vivons une ségrégation
De ces hommes aux idées qui n’ont rien de sanitaire.
Charlotte
Empreintes
Rien vu, rien entendu : à l’heure du drame, à l’aéroport des rosiers, une coccinelle drapée dans son boubou rouge à pois noirs était en plein décollage pour Tombouctou : aussi n’a-t-elle rien vu, rien entendu.
Gaston, célèbre gastéropode des lieux, d’allure tardigrade, était au concert des sauterelles dans les herbes folles des terrains vagues : aussi n’a-t-il rien vu, rien entendu.
Limace, sa compagne, de retour de son après-midi enlacée avec chou, son amant, repue, dormait : elle n’a rien vu, rien entendu.
Les savoirs dans les ventres des uns et des autres, à l’heure où j’écris cette dépêche de dernière minute, le mystère non élucidé reste entier. Mais comme bon sang d’encre ne saurait mentir, chaque bribe, piste, trace d’histoire sera toujours bonne à prendre.
En attendant, je guette l’arrivée de la police des airs....
Sylvie
Le sens de la vie
Il y a des leurres qu’on ne voit pas
Il y a des pleurs qu’on n’entend pas
Il y a ces visages comme des millions de drapeaux blancs
Il y a ces erreurs qu’on fait depuis longtemps
Comment parler de ça
Sans briser mes doigts
Devant mon nez
Je vois des masques tomber
L’angoisse me montre son visage
Elle me force à parler son langage
Rien ne peut arrêter cet orage
Qui me tire de mes profonds mirages
Je sais qu’on nous l'interdit
Et je sens la fièvre qui me mord
Sans que j’aie l’ombre d’un remords
Dans ce triste monde j'écris
Et comment retrouver le sens de la vie ?
Dans une autre vie je partirais loin d’ici
Je me ferais petit chat
Pour me blottir dans tes bras.
Charlotte
Sensuelle passe par les pores
La saison s’annonçait splendide.
Ce matin-là, vêtu de ma chemise en lin blanc et d’un pantalon assorti, de chaussettes en fil d’Écosse et d'une paire d’espadrilles basques, j’enfourchai ma bicyclette rouge.
Bille en tête, je m’élançai à sa conquête.
Depuis quelque temps, de loin, je l’observai : ronde, pulpeuse, sensuelle.
Non content de ce privilège, ses charmes attisaient mon insupportable désir ‘y goûter. C’est que jour et nuit, la belle s’y mirait aussi.
Les pores de sa peau offerts au soleil et à la lune lui conféraient un chien fou.
Alanguie, racée, haute perchée, elle me dardait.
Déjà dans ma course folle, le visage réjoui, de ses atours j’anticipai, d’un coup de boule ajusté, l’assaut puis la récolte qui adoucirait mon ignition charnelle.
Mordre dans sa chair dorée, charnue, sucrée, et de cette bouchée juteuse unir nos 2 corps, voilà qui augurait d’un passage de vie héroïque.
J’entrai en son verger, en son paradis où les fruits se donnent et ne s’achètent pas.
Sylvie
Impasse sanitaire
Passe-impasse pair impair et manque
Les puissants ont joué avec nous
Passe-impasse pair impair et manque
Les puissants se sont joués de nous
La Liberté
Emprisonnée
La Pureté
Annihilée
Nous n’aurons plus jamais le choix
Qu’est devenue l’Humanité
Il ne nous reste que le rejet
Ne nous laissons pas séparer
Ne nous laissons pas diviser
Par le Passe discriminatoire
Marianne Louise
À la robe d’Émeraude
Septembre arrivait, les chênes verts derrière moi, je levai la patte, à bâbord toute vers ces paysages d’eau et de ciel qui ravinaient ma frimousse de caresses salées.
Respirer l’ailleurs m’attendait une fois encore dans cette contrée où des mouettes chaloupaient au creux de vagues démontées, où la palette des couleurs palabraient entre elles, et dont les plus hardies, impétueuses, éclaboussaient cette terre battue par les flots qui déferlaient avec rage sur les rochers déchiquetés. Combien de fois recommencé lorsque la houle s’alliait aux mugissements du vent avant de porter l’estocade aux récifs dans un ultime roulis fracassant.
À terre, truffe au radar, je guettai les pirates et corsaires des airs et des souricières, avec pour seul témoin cette brume de silence granitique où rodait l’ombre fantomatique des écumeurs naufragés qui ne s’y comptaient plus.
Des gens du pays racontaient que les flots continus et le chant du vent portaient au grain de folie.
Fille de mes ancêtres, je savais que les conquérants, les curieux, oscillent, boussole ou pas, d’Est en Ouest, franchissent des cols, des nez, que dis-je ? Des caps à la recherche de ces petits riens, sous ce ciel immense à l’humeur changeante, sur lequel les contours des iles imprimaient l’âpreté de leur roche solitaire.
Allongée à flanc d’une dune à la jeunesse courbe, j’observai les voiles gonflées porteuses d’avenir.
Dans la baie de St Malo à l’odeur puissante, des moules vrillées à leurs poteaux de bois de chêne délimitaient le grand large et ses dangers. Vaillantes filles aux reflets d’argent, elles bravaient la houille bleue ancestrale et les ravissements cycliques de mers déchaînées.
À terre, je pistai les sentiers des contrebandiers qui menaient aux cales où de vieux doris en bois tanguaient sur le clapotis dans l’attente de leur prochaine levée d’ancre.
Voyageuse née, je trottai au rythme de l’arrière-saison chinée d'ors et de pourpre sur cette terre balisée de lichen, aux allures de jeune tourbière irlandaise, aux accents de moor écossaise.
Les maisons de pays, pudiques, s’y resserraient derrière un voile en dentelle et sollicitaient la protection des murets pour les noces fleuries.
Sages écolières, aux tabliers de chaux blanchie, alignées côte à côte, leurs bancs désertés par une jeunesse partie en quête d’herbe grasse, elles veillaient à la lueur de l’ambre automnal les histoires au long cours de vieux loups de mer. Basses de murs, les assauts naturels n’y trouvaient aucune prise. Seule la complainte lancinante de la houle océane serpentait entre leur corps à l’heure où hier, dont l’absence cruelle affleurait dans les regards humides, forait les consciences jusque tard dans la vie des Hommes.
Dans ce pays où le soleil se meure dans la mer avant de partir caresser les chaloupes dans la baie de Valparaiso entre 2 tangos, une vieille bigoudène s’était repliée derrière son muret auquel elle avait confié les chagrins de sa jeunesse emportés à la force des tempêtes humaines.
Là-bas, à l’Ouest, sur cette terre où les rêves précèdent les conquêtes folles, vaillante moussaillon je continuerai à pourfendre les embruns, engagée à travers l’armada des gouttelettes scintillantes comme autant de moulins à vent.
À respirer l’ailleurs.
Sylvie
IA ORANA !
Chers ancêtres et chers guerriers qui ont demeuré sur notre Terre, chers madame Ariane Bilheran, intervenantes et intervenant de l’atelier littérature et totalitarisme, je vous salue et soyons heureux en cette rencontre !
Gloire au puissant Achille, dont le libre arbitre, qui est un don divin, lui a offert la capacité de choisir sa destinée.
Puissions-nous emprunter le chemin que nous montre ce héros, et avec courage relevons le défi de métamorphoser l’obscurité en lumière pour la diffuser.
Mais comment cultiver et préserver nos vertus dans une société autant pervertie ? Comment ne pas se faire avaler par notre peur lorsque la liberté est conduite sur l’autel du sacrifice ? Comment accepter, dans la confrontation à un dilemme, que la mort puisse être une des solutions envisagées ?
Moehau
Ce message se crie, se danse, se ressent c'est un orero, une façon de transmettre, de communiquer, ancestrale sur l'île de Tahiti, comme cet autre torero :
TAHITI NUI !
Terre éclairée par les étoiles de Matari'i (Les Pléiades), réchauffée par Raa (Dieu Soleil), protégée par Ruahatu (Dieu de l'océan); où les chants des oiseaux sont aussi multiples et variés que les couleurs des poissons de nos lagons.
TAHITI bien aimée !
Beauté divine, entourée de beaux corps ornés de fougères.
TAHITI bien aimée !
Que sont ces sons fracassants qui résonnent de l'antre sous-terrain ? Ils s'élèvent en s'amplifiant, ils tournoient en s'éloignant, pour s'unir au vent jusqu'au rivage. Là où les vagues fleurissent et dansent. Là où le sable se soulève et se disperse. Là où les palmes s'alignent et se trémoussent. Là où les mélodies entraînantes communient. Ah! Festival de la Nature.
Ô TAHITI, entends mes plaintes désespérées.
Entends le cri conquérant de ton enfant.
Ô ciel clément, apaise mon cœur meurtri.
Larmes amères et triste amour pour ma bien aimée. Une voix puissante m'interpelle comme à regret.
Quelle chose, dans l'autre monde, t'attire t-elle pour vouloir t'en aller ainsi ?
Regards embués d'émotions.
Que veux-tu de plus dans l'autre monde, que je pourrais peut-être t'offrir, dans ce monde où s'entremêlent joie et tristesse, espoir et liberté. Peuple de mon île ! Où es-tu aujourd'hui ! Loue ta belle langue ! Valorise ta culture !
Réapproprie ta richesse ! Amis, peuple polynésien !
Nous avons une terre !
Luttons pour sauvegarder notre héritage!
Afin que vive TAHITI !
Moehau
Démasqué
Dans ce tissu fin
Cousu de lin
Un souffle bénin
Recrachait un pépin
Seul dans la nuit
Comme un enfant pâle
J'allais sans voile
Dans cet endroit maudit
Et je m'étais laissé empoigner
Par un policier au bec acéré
Qui était venu me surprendre
Et me demander de couvrir mon nez
Quand au bout du sentier
Je m'étais arrêté
Écouter les oiseaux chanter
Et mon cœur s'emballer
Nous voilà au lever
Je me suis laissé réveiller
Par un chien venu me méprendre
Et me délivrer une amende
Charlotte
L'échappée
Dans un contexte sanitaire contraignant, un matin depuis l’encadrement de sa fenêtre, un jeune homme observe un verger où des fruits dorés à souhait lui guignent de l’œil. À 11h, la radio annonce la fin du confinement, heureux, fougueux, le jeune enamoure se lance à l’assaut de l’objet de son désir, décidé à y goûter chair et jus. Savez-vous de quel fruit il s’agit ?
Il est connu en Lorraine.
Sylvie