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Focus sur le harcèlement: approches croisées, harcèlement, système et organisation

  • 3 janv. 2009
  • 3 min de lecture

Rédigé par Sylviane Lauro et publié depuis Overblog


Voici l'article rédigé par Ariane BILHERAN:


"Partie 1: Définition, agissements et processus



4 syllabes qui réveillent chez des millions de travailleurs un émoi, voire une terreur… Un mot qui peut tuer, et qui engendre des souffrances atroces chez les individus mais aussi sur leur entourage professionnel et familial… Un phénomène qui s’explique principalement aujourd’hui par le délitement du lien social et l’instauration de structure sociale de type pervers… Il sera question à travers cette rubrique de dépasser le conflit purement interindividuel et de montrer comment le harcèlement est toujours le symptôme du dérèglement d’une organisation donnée.


Revenons en premier lieu sur le harcèlement? Qu’est-ce que c’est? Quels en sont les processus?


«Il vise la destruction progressive d’un individu ou d’un groupe par un autre individu ou groupe, au moyen de pressions réitérées destinées à obtenir de force de l’individu quelque chose contre son gré, et, ce faisant, à susciter et entretenir chez l’individu un état de terreur.».

Ainsi, le harcèlement est souvent considéré comme le fait d’agissements nuisibles de la part d’un harceleur sur un harcelé. On pourrait donc penser que des agissements précis permettraient de déterminer plus facilement s’il s’agit d’un harcèlement moral, mais la réalité du harcèlement s’inscrit dans l’insidieux, le non-factuel, le non-dit. Les non-agissements sont donc tout aussi importants : ignorer la personne harcelée, ne plus lui donner de travail, ne plus l’inviter aux réunions, ne plus lui donner accès aux informations, ne plus la mettre en copie des mails…


Le processus harceleur vise la destruction psychique de la personne harcelée. La destruction est atteinte quand la personne se laisse détruire, voire finit par corroborer cette destruction (idées suicidaires…), ce qui ne manque pas d’arriver, en fonction de l’intensité de la violence et de la durée du harcèlement.


Si vous avez lu Hirigoyen, vous n’êtes sans doute pas sans savoir que le processus malveillant s’alimente des réactions de la personne harcelée. Car le harceleur sait souvent bien identifier les fragilités de l’autre (et nous en avons toutes et tous !) pour conduire sa victime à l’autodestruction, jusqu’à ce qu’elle «craque». Ainsi, quelle que soit la réaction de la victime, cela va se retourner contre elle: si elle se met en colère, on dira «qu’elle a pété un câble», si elle pleure «qu’elle est hystérique», etc.


Mais il s’agit de dépasser ce contexte «bourreau-victime» et de ne pas oublier la dimension intrinsèquement collective. Le harcèlement moral implique en effet toujours un groupe, qu’il soit témoin passif, complice ou «résistant». La dimension sociale du harcèlement moral est incontournable pour comprendre la spécificité du phénomène. En effet, les réaction du groupe ont le pouvoir de condamner socialement la victime, ou de la réhabiliter, avec pour spécificité qu’un silence condamne dans la mesure où la victime vivra comme une blessure très profonde ce que l’on pourrait qualifier de non-assistance à personne en danger.


Il est en effet illusoire de penser que, dans un groupe, où sévit du harcèlement, l’on puisse être neutre. Soit on est pour l’autonomie, soit on est pour l’asservissement.


La nature du groupe en question permet l’existence de ce harcèlement. Si le harcèlement a lieu, c’est en effet que le groupe l’a laissé se mettre en place au sein d’un environnement corrompu: soit d’autres personnes ont intérêt à supprimer la victime, soit elles sont particulièrement laxistes, soit le harceleur s’octroie les faveurs des uns et des autres avec des largesses… Mais de la même façon, les membres du groupe subissent tous l’existence de ce harcèlement qu’ils ont laissé s’instaurer. Les personnes passives peuvent elles-mêmes développer des symptômes propres à la victime, comme des angoisses, des insomnies…


Quant aux personnes complices, elles le sont de manière intentionnelle ou font l’objet de la manipulation du harceleur."


(1) Source Les cahiers des fps - Août 2008.

(3) BILHERAN A. Le harcèlement moral, Paris, Armand Colin, 2006.

BILHERAN Ariane, «Harcèlement, système, organisation», Les Cahiers des Facteurs Psychosociaux, Catéis, août 2008.


En remerciant vivement pour leur aimable accord pour cette publication Mme BILHERAN ainsi que M. MARTINI de Cateis (cahier FPS).



Harcèlement


À suivre en partie 2: les logiques d'aliénation du groupe


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