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Interview sur le harcèlement sexuel

Dernière mise à jour : 6 juil.

24 juin 2012


Découvrez les réflexions d'Ariane Bilheran interviewée par Mathias Germain dans Le Nouvel Observateur sur le harcèlement sexuel...


«Après un harcèlement sexuel, un accompagnement médical, psychologique est important. Les spécialistes le constatent, être victime une fois augmente le risque de l’être à nouveau… Une étude américaine récente portant sur 6000 femmes victimes d’agression sexuelle confirme ce risque. La moitié de ces personnes étaient victimes de plusieurs agressions et 20 % d’entre elles souffraient d’un syndrome post traumatique (PTSD).

«Cela s’explique par un sentiment de culpabilité développé par la victime. C’est un vrai danger, souligne le Pr Louis Jehel, chef de service de psychiatrie au CHU de Fort de France. C’est un élément important des troubles que peuvent ressentir les victimes d’agression ou de harcèlement qui doit pris en compte.»

«Les services judiciaires devraient aussi mieux prendre en compte ce sentiment de culpabilité, estime Ariane Bilheran, psychologue, dirigeante et consultante de la société Sémiode, auteure de plusieurs ouvrages sur le harcèlement. Quand une victime fait la démarche de plainte auprès des services de police, ce sentiment de culpabilité la dessert. L’officier de police se dit qu’elle a quelque chose à se reprocher.»

Le problème est que le harcèlement sexuel est encore une réalité tabou en France. «Les victimes ont souvent honte et préfèrent quitter l’entreprise, plutôt que de le signaler en interne», constate Ariane Bilheran. Il m’est arrivée de rencontrer des femmes sans cesse humiliées, qui répétaient: «Ce n’est pas grave » et préféraient s’enfuir. Il faut plus de formation et de prévention dans ce domaine. Nous sommes à des années lumières du Québec par exemple. Cela fait déjà trente deux ans qu’il existe dans cette province du Canada un groupe d’aide et d’information sur le harcèlement au travail.»

Une réalité tabou qui s’explique par une défaillance sociale et un problème d’éducation culturelle, pour Ariane Bilheran. «Si le harcèlement s’exerce d’individus à individus, il ne faut pas oublier la dimension collective: le harcèlement est possible parce que dans un service, flotte un climat permissif, irrespectueux, sexiste», souligne Ariane Bilheran.

Et cela peut parfois prendre des formes délirantes. «Dans le cadre d’une réunion hebdomadaire de service dans une société, les salariées de ce service qui y assistaient ont eu la désagréable surprise de voir dans un diaporama, un montage photo pornographique qui les représentait», rapporte la psychologue. «Tout le monde se gausse. Et ça passe comme si de rien n’était. Ce type d’environnement ouvre la porte au harcèlement. Il y a une vraie problématique sociale et d’éducation culturelle à prendre en compte.»

La situation changera-elle en France? Un nouveau projet de loi a été présenté cette semaine en conseil des ministres. Ce texte punit d’un an de prison et 15 000 € d’amende «le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des gestes, propos ou tous autres actes à connotation sexuelle, soit portant atteinte à sa dignité, […] soit créant un environnement hostile, dégradant ou offensant» . Il prévoit des circonstances aggravantes portant la peine à trois ans de prison et 45 000 € d’amende.

Mais le texte suscite déjà des critiques de la part des associations comme l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT). C’est le terme «imposer» qui fait notamment réagir la déléguée générale, Marilyn Baldeck. «Il est parfois difficile de prouver au juge le fait que les actes ont été imposés».


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