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Le pouvoir harceleur face à ses opposants

Dernière mise à jour : 16 juil.

11 janvier 2014


«Toute rencontre avec les hommes fournissait à Démocrite matière à rire». Juvénal, Satires, X, V, vers 47.

« Dans une libre République, chacun peut penser ce qu'il veut et dire ce qu'il pense».

Spinoza.

Pour bien commencer l'année 2014, intéressons-nous aux moyens par lesquels un pouvoir harceleur supprime ses opposants.

Cette analyse est valable pour tous les types de harcèlement.

Rappelons simplement que la visée du harcèlement est bien de soumettre ou de démettre.

Tout d'abord...


Comment le pouvoir harceleur identifie-t-il ses opposants ?


L'opposant du pouvoir harceleur est toujours celui qui met en lumière ce qui doit rester, d'après le harceleur, bien caché de tous : corruption, escroquerie, manipulation, perversion, tyrannie, protections d'individus criminels etc.

La plus grande crainte du pouvoir harceleur est d'être démasqué dans ses malversations.

L'opposant est donc un résistant au pouvoir harceleur, souvent une personne très autonome, résistante à la tyrannie, comme je l'ai déjà expliqué dans Le harcèlement moral (Armand Colin, 3e éd. En 2013).

Comment se débarrasse-t-il de ses opposants ?


L'adage « qui veut tuer son chien l'accuse de la rage » est particulièrement adapté au procédé du pouvoir harceleur. En voici les étapes :


1) discréditer l'opposant en pratiquant la désinformation à son encontre : diffusion d'informations erronées, propagande, calomnie..., et en supposant que les personnes jugeront de l'opposant à partir de la seule désinformation pratiquée ou de pseudo-sondages trafiqués . Le harceleur est le spécialiste du "parler au nom de tous".

Ex. : dire que la personne fait du mauvais travail, le comble étant de l'accuser elle-même de harcèlement pour justifier un harcèlement à son encontre...

La discréditer en public sans apporter la preuve du discrédit, sans donner les moyens de la défense, sans permettre que l'opposant ne s'exprime à ce sujet (muselage de la parole de l'opposant), en interdisant le débat d'opinions...


2) l'isoler et le pousser à la faute

Ex. :

  • l'empêcher de s'exprimer lors de réunions publiques ou de spectacles,

  • le séparer de ses collègues et pratiquer l'art de la division,

  • le rendre infréquentable sur la base d'accusations mensongères, d'interprétation orientée de propos et de comportements (orchestration de propagande, pressions pour signature de pétitions au sein de l'entreprise contre l'opposant etc.),

  • le pousser à la faute en le mettant sous pression psychologique (humiliations, insultes...), matérielle (suppression des moyens pour exercer son travail, pressions financières...) et/ou physique (agressions...).

3) l'accuser des pires maux (la victime devient alors coupable : perversion inhérente au processus harceleur) : l'opposant serait « hystérique », « syndicaliste », « antisémite », « dangereux », « terroriste », « antisocial », « malade mental »,... et même… « harceleur » !

Ex. : faire accuser l'opposant de « harcèlement » sur la base d'une enquête partiale menée par une seule personne « juge et partie » et d'une audition unilatérale (seuls les plaignants étant entendus) et, qui plus est, en lien d'intérêts et d'amitiés avec la Direction...


4) s'improviser comme étant la résolution de ces maux (problème - réaction - solution)...


5) stigmatiser et liquider les amis de l'opposant par des stratégies diverses : séduction, corruption, manipulation, intimidation, terreur. Les accuser de « trahison » s'ils ne collaborent pas.

Ex. :

  • Proposer à l'ami de trahir l'opposant moyennant un poste plus haut placé dans l'entreprise.

  • Menacer la famille de l'opposant et lui jeter des pierres sur sa maison.

  • Verser des pots de vin pour que la personne soit blacklistée (pour retrouver un travail...).

  • Intimider d'éventuels soutiens à l'opposant en menaçant de les rétrograder, de les licencier, de les sanctionner.

  • Etc.


Pourquoi s'en débarrasse-t-il ?


Pour asseoir son pouvoir absolu et continuer de jouir des privilèges de sa toute-puissance en toute impunité.

Comment évincer un pouvoir harceleur ?


  • Comprendre que ce que les opposants subissent, vous le subirez aussi. S'informer sur les procédés de harcèlement, de manipulation et de lavage de cerveau.

Lire par exemple :

  • Harcèlement. Famille, Institution, Entreprise (Armand Colin, 2009).

  • Tous des harcelés ? (Armand Colin, 2010).

  • Le harcèlement moral (Armand Colin, 3e éd. 2013).

  • Manipulation. La repérer, s’en protéger (Armand Colin, 2013).

  • Ne céder ni au chantage, ni à la culpabilité, et surtout pas à la peur : la peur en elle-même asservit.

  • Rester solidaires dans le collectif.

  • Nommer ce qui se passe. Ne pas rester silencieux.

  • Se rappeler à tout instant que « renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme » (Rousseau).

  • Demeurer lucide : le pouvoir harceleur n'a jamais de bonnes intentions à votre égard, surtout s’il vous prétend le contraire !

  • N'utiliser la violence qu'en extrême recours car la violence nourrit le pouvoir harceleur...

  • Nourrir la bienveillance et la compassion en soi, et ne laisser aucune place aux sentiments d'impuissance et de haine.

  • Rire... Le rire est l'arme la plus puissante qui soit car, avec le rire, plus le pouvoir devient harceleur, plus il devient comique.

La subversion du rire satirique, celle de Démocrite, est corrosive, radicale, et... démocrate.

NOTA BENE :

Tous les exemples cités proviennent de situations déjà observées en entreprise lors de nos enquêtes.


Ariane BILHERAN, Normalienne, Docteure en psychopathologie, Ecrivain, Consultante.

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